Germaine Tillion : dernier voyage d'une résistante absolue

Publié le par marine

"Ce qui m'a rendue lucide, c'est l'ethnographie. Elle m'a faite, dès le départ, respectueuse de la culture des autres. Chacune est un jardin clos, destiné, paradoxalement, à communiquer avec les autres. Il faut en entrouvrir les portes et y garder, toujours, un coin de mauvaise herbe"

Il y a des morts qui le sont plus que d'autres, Germaine Tillion a tiré sa révérence au monde, samedi 19 avril. Indépendante farouche et résistante éternelle, elle n'a jamais renoncé aux combats contre l'injustice, toutes les injustices. Un parcours sans faille en résistance qui démarre en 1940. A 34 ans, elle co-fonde le groupe du Musée de l'Homme, l'un des premiers réseaux de résistance. Dénoncée et déportée à Ravensbrück, libérée le 23 avril 1945, elle écrit dans « Ravensbrück », un ouvrage magistral «si j’ai survécu, je le dois à coup sûr au hasard, ensuite à la colère, à la volonté de dévoiler ces crimes et, enfin, à la coalition de l’amitié ».

Si les hommages multiples qui lui sont rendus à travers la presse mettent en avant cet engagement ainsi que de l'acharnement avec lequel elle a dénoncé la torture et le terrorisme durant la guerre d'Algérie omettant souvent d'ajouter qu'elle a créé les centres sociaux pour les ruraux musulmans déplacés en 1957 et analysé de son regard d'ethnologue de haut rang les dysfonctionnements de la société coloniale, sa capacité de révolte l'a conduite à soutenir bien d'autres causes.

En 1951, elle contribue à la création de la Commission internationale contre le régime concentrationnaire qui dénonce l'existence de goulags en URSS. En 1959, elle réussit à faire voter une loi pour autoriser les détenus français à passer des diplômes en prison. La pauvreté, les sans-papier, la guerre contre l'Irak,... rien ne lui aura échappé.

Cette connaissance intime de la barbarie n'a en rien entamé son humanisme. Lorsqu'en 2000 la polémique resurgît sur la torture (l'affaire "Aussaresses"), Germaine Tillion signe l'appel des Douze, soutenue par le journal communiste l'Humanité. Elle explique sa
position "Il faut punir les actes mais (...) il faut avoir un peu pitié des gens qui les ont commis…".

Germaine Tillion était un modèle, pas assez connue et trop peu entendue, elle laisse une oeuvre qu'il devient urgent de lire pour un nouveau vivre ensemble.

 

Publié dans Blanc

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article