Jose Saramago, une vie en colère

Publié le par marine

lola-of-skagen-20.jpg

Si Dieu existe, pourvu qu'il ne soit pas aussi méchant que Jose Saramago l’a décrit dans ses livres. Si tel est le cas, l'écrivain a déjà été condamné à l'enfer à perpétuité. Prix Nobel de littérature en 1998, l’écrivain portugais, José Saramago est mort à 87 ans. Dans l’un de ses livres, « Les intermittences de la mort » paru au Seuil, il avait imaginé la mort en grève et l’humanité peuplée de vieillards acariâtres et de malades inguérissables. Sa vindicte portait depuis quelques années sur deux cibles privilégiées : Dieu et Berlusconi. Il réinterprétait la bible au grand dam de l’église  "Les hommes ont créé Dieu à leur image et ressemblance, c'est pourquoi il est si cruel, mauvais et vindicatif." avait-il exprimé dans un entretien au quotidien espagnol La Vanguardia. Le scandale avait été si important qu’il s’était exilé au Canaries, où il est mort hier.

Originaire d'une famille d'agriculteurs, il abandonna, pour des raisons financières, le lycée afin de suivre une formation de mécanicien. Il s'essaya à divers métiers dans l'administration publique, travailla dans des maisons d'édition puis dans des journaux, notamment comme rédacteur en chef adjoint à Diário de Notícias, un emploi qu'il dut cependant quitter à la suite des événements politiques. En 1969, il adhéra au parti communiste, alors interdit, où il a pourtant toujours adopté une attitude critique. Après le succès qui arriva alors qu’il avait déjà 60 ans, il se consacra  à l’écriture tout en continuant à intervenir dans la presse pour dénoncer les injustices. Altermondialiste engagé, José Saramago appartenait au Parlement international des écrivains. Il a signé le Manifeste de Porto Alegre et appartenait au comité du Tribunal Russel pour la Palestine, fondé en 2009.

Saramago avait le souffle épique et le sens de la fable poussés à l’extrême dans ses derniers livres un peu trop schématique sans doute : L’Aveuglement(1995), une épidémie de cécité frappe l’humanité, La Lucidité (2004) peint un peuple qui se refuse à jouer un jeu démocratique faussé en alignant les bulletins blancs. Caïn(2009), une relecture de l’Ancien testament qui provoqua la ire de l’église  achève une œuvre qui compte aussi des essais, du théâtre, des Journaux.

Comme d’autres, j’avais regretté que le jury du Nobel préfère cette œuvre à celle de son compatriote Antonio Lobo Antunes, plus subtile et complexe, plus riche et profonde. Et je maintiens cette position sans rien ôter du talent et de l’engagement de Saramago. Mais si vous n'en avez qu'un à lire, choisissez Antonio Lobo Antunes dont l'écriture est un régal. Je parie que c'est lui qui passera à la postérité.

Publié dans Blanc

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article